Un insecticide mis en cause dans la mortalité des abeilles
Les abeilles ne retrouveraient pas leur chemin à cause d'un pesticide. Ce qui causerait une forte mortalité. Des allégations niées par Syngenta, le fabricant du Cruiser®, la substance en question, mais qui sont corroborées par une étude scientifique parue dans Science.
Une étude de l'INRA, parue dans la revue Science, le 29 mars 2012, met en évidence le rôle d'insecticide dans le déclin des abeilles. Celui-ci perturberait leur orientation et leur capacité à retrouver la ruche. L'étude a été menée sur 653 abeilles marquées par une puce à radio-identification permettant de suivre leur déplacement. Les chercheurs ont ensuite administré une dose de thiaméthoxam et ont remarqué qu'elles ne retrouvaient pas forcément le chemin de leur ruche. Conséquence : le nombre d'abeilles chute dans les colonies ce qui empêche le renouvellement.
L'insecticide mis en cause est de la famille des « néonicotinoides », le thiaméthoxam l'une des matières du produit Cruiser® OSR, utilisé pour la protection des cultures, essentiellement le colza et le mais, contre certains ravageurs. L'étude laisse penser que « l'impact de l'insecticide sur les colonies pourrait être significatif ».
Alertes des autorités
Dès la sortie de la publication, le ministère de l'Agriculture a indiqué qu'il a saisi l'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) ainsi que la Commission européenne et l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Les conclusions de l'ANSES devraient être rendues d'ici le 31 mai. Objectif : voir si l'étude se confirme en plein champ. Si c'est le cas, le pesticide serait retiré du marché.
Cette étude a déclenché de vives réactions de la part de Syngenta, qui commercialise l'insecticide. Une publication jugée « trop éloignée de la réalité » selon le numéro un de l'agrochimie. « Pour atteindre la quantité de thiaméthoxam retenue dans l'étude, l'abeille devrait consommer quotidiennement jusqu'à sept fois son propre poids en nectar », justifie-t-elle. Syngenta déplore également l'impact des pesticides sur le nombre d'abeilles : « les résultats n'ont montré aucune baisse de poids des colonies au cours de la floraison. »
A chacun son rôle
En réponse Axel Decourtye, le chercheur français de l'étude a lancé : « chacun son boulot, ce n'est pas à nous, et encore moins à la firme, de définir s'il y a risque ou pas, ce sont les instances officielles qui ont mission de statuer là -dessus. »
Nombre d'apiculteurs français se sont félicités de la publication de l'étude. L'Union nationale de l'apiculture française (UNAF), positionnée contre les pesticides, exige « le retrait immédiat du Cruiser et de l'ensemble des pesticides néonicotinoides tueurs d'abeilles ».
Pour la section apicole de la FNSEA, plus mesurée, la « publication valide en partie des observations d'apiculteurs professionnels sur la disparition de butineuses. » Elle félicite « l'outil de recherche pour mieux comprendre la disparition des abeilles » mais indique que les phénomènes observés ne doivent pas « être associés systématiquement à des pratiques phytosanitaires. »