Irrigadour sur les fonds baptimaux
Une page importante dans le vaste dossier de l'irrigation a été écrite à Aire-sur-l'Adour, mardi dernier, 18 décembre. En officialisant la création de la structure Irrigadour, les responsables des quatre chambres d'agriculture du bassin (Landes, Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées et Gers) et ceux de l'Institution Adour (établissement public interdépartemental constitué par les quatre conseils généraux) ont ouvert un nouveau chapitre.

En compagnie du préfet des Landes, les quatre présidents des chambres départementales d'agriculture, entourés des professionnels engagés sur les questions d'irrigation, ont signé les statuts d'Irrigadour, avec le président de l'Institu
Irrigadour a pour vocation de devenir l'organisme unique de gestion collective des prélèvements d'eau destinés à l'irrigation agricole dans le bassin de l'Adour et plus précisément au sein de la zone de répartition des eaux (lire zoom plus bas). Suite à cette signature des statuts, la candidature va être déposée auprès du préfet coordonnateur du sous-bassin (à savoir le préfet des Landes) avant le 31 janvier prochain. Sauf surprise, celle-ci devrait être retenue, car Irrigadour est, pour l'heure, le seul prétendant en lice.
C'est la loi sur l'eau, du 30 décembre 2006, qui est à l'origine de cette démarche. Ce texte prévoit, en effet, de confier à un organisme unique la gestion collective des prélèvements d'eau d'irrigation agricole à l'échelle d'un bassin versant. Dès 2009, les professionnels agricoles, au travers des chambres d'agriculture des quatre départements concernés, se sont portés candidats à cette mission. L'Institution Adour, à qui incombe notamment la gestion qualitative de la ressource, le suivi des niveaux d'étiage, ou la protection des milieux aquatiques, a réalisé le même cheminement.
Le choix de la raison
Les élus des différentes structures ont finalement choisi de s'associer sous la forme d'un syndicat mixte ouvert, baptisé Irrigadour. Un mariage pas forcément évident au premier abord. Lors de cette signature, l'ensemble des partenaires a salué un choix sage et pertinent. «On a choisi la solution de la raison et de l'efficacité. Nos différentes compétences ne pouvaient pas continuer à vivre leurs vies séparément», avoue Dominique Graciet, président des chambres d'agriculture des Landes et d'Aquitaine.
De son côté, Jean-Claude Duzer, président de l'Institution Adour (et vice-président du conseil général des Hautes-Pyrénées) évoque un compromis audacieux et unique en son genre. «Les débats en interne ont parfois été vifs, mais le consensus s'est vite dégagé. À travailler ensemble, nous serons tous meilleurs». Alors que le sujet traîne en longueur dans d'autres régions, avec des tensions parfois sévères, la mise en place de ce partenariat entre collectivités locales et monde agricole constitue une première en France.
Gouvernance partagée
En pratique, le syndicat mixte ouvert comprendra donc des représentants des élus politiques et des professionnels agricoles, pour une gouvernance partagée et deux enjeux majeurs: la gestion de l'eau d'irrigation et la création des ressources de prélèvement et de soutien d'étiage. Il sera composé d'un organe de gouvernance, le comité syndical, qui réunira les quatre présidents de chambre d'agriculture et quatre élus de l'Institution Adour.
L'organisme unique sera chargé de la politique générale, de gérer les demandes d'autorisation pluriannuelles. Son fonctionnement sera articulé autour de deux commissions. La commission opérationnelle de gestion de l'eau, présidée par un représentant des chambres d'agriculture, s'occupera du plan de répartition annuel de l'eau et de la procédure mandataire. La commission d'orientation des ressources, présidée par un représentant de l'Institution Adour, donnera quant à elle son avis, au préfet de chaque département, sur les projets de nouveaux points de prélèvements. À ce sujet justement, beaucoup de chemin reste à faire.
Si l'organisme unique est désormais sur de bons rails, les professionnels agricoles exhortent les représentants de l'État à tenir leurs engagements vis-à -vis de la création d'ouvrages. 55 millions de mètres cubes de stockage supplémentaires ont été promis pour le bassin Adour-Garonne, dont 20 millions pour l'Adour et la Midouze (une partie importante de ces volumes est destinée au milieu et au débit d'étiage). «Visiblement, l'État n'est pas pressé de démarrer la course contre la montre, déplore Dominique Graciet. On attend qu'il tienne ses engagements. Dans le cas inverse, ce serait un signe très négatif».
Fabien Brèthes
Le bassin de l'AdourLa zone de répartition des eaux (ZRE) du bassin de l'Adour concerne 149000 hectares irrigués, 5600 agriculteurs et 20000 points de prélèvement. Jusqu'à la mise en place de l'organisme unique, les autorisations de prélèvement sont gérées par le biais de procédures mandataires qui permettent à la profession agricole de représenter les irrigants pour leurs demandes de renouvellement ou de modifications de leurs autorisations annuelles de prélèvements, auprès des services de l'État. Cette procédure continuera pour tous les points de prélèvements situés hors ZRE.