Enrobage des semences : Bruxelles interdit trois insecticides
La Commisssion européenne va interdire pour deux ans l'usage des trois principaux insecticides néonicotinoides (clothianidine, thiamethoxame et imidaclopride) en enrobage de semences, en traitement de sol et en pulvérisation sur les cultures attractives pour les abeilles.

La suspension des néonicotinoides suscite l'indignation des producteurs : Orama estime que cette interdiction ne repose pas sur des démonstrations. Elle ne résoudra pas le problème de la mortalité des abeilles car les causes sont multifactorielles. Â
Le vote des États membres en comité d'appel, le 29 avril, n'ayant pas permis de dégager de majorité qualifiée pour ou contre la proposition de la Commission européenne, la décision revient donc à Bruxelles qui va «dans les prochaines semaines» adopter ce moratoire, a assuré le commissaire européen à la santé, Tonio Borg. Pour prendre cette décision, Bruxelles se fonde sur un avis de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) publié au mois de janvier.
Après différents changements de positions (lire le zoom), quinze pays ont finalement voté pour cette interdiction. Il s'agit de la France, l'Espagne, l'Allemagne, la Bulgarie, l'Estonie, la Belgique, le Danemark, Chypre, le Luxembourg, la Lettonie, la Slovénie, Malte, les Pays-Bas, la Pologne et la Suède. Huit (Royaume-Uni, Italie, Hongrie, Portugal, Roumanie, Autriche, République Tchèque et Slovaquie) s'y sont opposés et quatre se sont abstenus (Irlande, Grèce, Lituanie, Finlande).
15 pour, 8 contre et 4 abstentions
Le texte qui devrait être adopté dresse pour chacune des trois substances une liste des cultures sur lesquelles l'usage des néonicotinoides est interdit, comprenant de nombreux fruits et légumes ainsi que la plupart des grandes cultures à l'exception des céréales d'hiver (blé, orge) et de la betterave sucrière. Le traitement des cultures attirant les abeilles sera exceptionnellement possible pour les cultures sous serre et les cultures de plein champ après la floraison.
Ce texte, qui devait à l'origine entrer en vigueur dès le 1er juillet, ne sera mis en application qu'à partir du 1er décembre. De nombreux agriculteurs et distributeurs ayant déjà acheté leurs semences, Bruxelles ne souhaite pas avoir à les dédommager. Les agriculteurs pourront donc une dernière fois cultiver du colza (semé à l'automne) traité avec des néonicotinoides.
Large spectre
Dans son avis défavorable, l'EFSA met principalement en cause les semences enrobées. Sur les traitements par pulvérisation, les données manquent. Bruxelles devrait néanmoins décider d'interdire tous les usages de néonicotinoides. Juridiquement, la décision sera plus facilement attaquable par les industriels qui commercialisent ces substances, les groupes Syngenta et Bayer.
Les industriels européens du secteur n'ont d'ailleurs pas manqué de réagir à cette annonce. La Commission n'est pas parvenue à obtenir une majorité qualifiée et devrait donc relancer les discussions sur de nouvelles bases, estime l'Association européenne des semenciers (ESA) qui demande une expertise scientifique plus poussée sur cette question.
Moratoire de 2 ans
De son côté, l'Association des industries de protection des plantes (ECPA) est préoccupée par l'utilisation abusive du principe de précaution qui, selon elle, «met en péril la compétitivité, la productivité et la durabilité de l'agriculture européenne et envoie un signal extrêmement décourageant pour l'ensemble du secteur agroalimentaire». D'ici deux ans, Bruxelles devrait réviser les conditions d'autorisation de mise sur le marché des insecticides néonicotinoides afin de mieux prendre en compte leur impact sur les populations de butineuses.
Pendant la durée du moratoire, des études en pleins champs devraient également être menées afin de mieux évaluer le rôle de ces insecticides. Les États membres devront notamment mener des programmes de surveillance des populations de butineuses.
Volte-face italienneLors de la réunion du 15 mars du Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale, 13 États membres avaient voté pour la suspension des trois insecticides.
En un mois, l'Allemagne a rejoint le camp des pays favorables à l'interdiction, mais l'Italie (qui avait voté pour) et le Royaume-Uni (qui s'était abstenu) s'y opposent désormais.
Le Royaume-Uni, qui a publié une étude en avril concluant que les néonicotinoides n'ont pas d'effets nocifs sur les abeilles en conditions naturelles, a mené la charge contre la proposition de Bruxelles. L'Italie, qui était favorable le 15 mars a finalement voté contre, voulant obtenir la possibilité de traiter les cultures avant leur floraison.
En un mois, l'Allemagne a rejoint le camp des pays favorables à l'interdiction, mais l'Italie (qui avait voté pour) et le Royaume-Uni (qui s'était abstenu) s'y opposent désormais.
Le Royaume-Uni, qui a publié une étude en avril concluant que les néonicotinoides n'ont pas d'effets nocifs sur les abeilles en conditions naturelles, a mené la charge contre la proposition de Bruxelles. L'Italie, qui était favorable le 15 mars a finalement voté contre, voulant obtenir la possibilité de traiter les cultures avant leur floraison.