Le ministère de l'agriculture échappe à la rigueur budgétaire
En légère hausse par rapport à 2010, le budget global du ministère de l'agriculture ne souffre pas trop du mouvement de réduction historique du déficit public, priorité numéro un du gouvernement.
À l'heure de la rigueur, le budget du ministère de l'agriculture sort relativement indemne du projet de loi de finances 2011, présenté par Christine Lagarde, ministre de l'économie, et François Baroin, ministre du budget, en Conseil des ministres le 29 septembre. Ce projet s'attelle en effet à réduire très sensiblement les dépenses de l'État car le déficit budgétaire français s'élève à 7,7 % du PIB en 2010. Or le gouvernement veut le ramener à 6 % l'année prochaine, soit une réduction de 1,7 point, un effort « jamais franchi » sous la Ve République, selon Bruno Le Maire.
Le ministre de l'agriculture a présenté le même jour un budget en hausse de 1,8 %, à 5,266 milliards d'euros. « C'est le signal de la volonté du Chef de l'État et du Premier Ministre d'accompagner l'ensemble du monde agricole dans la sortie de crise qui le touche et sa modernisation », a-t-il d'emblée commenté. Selon lui, le gouvernement débloque des crédits « suffisants » pour consolider le revenu des exploitants agricoles et financer les investissements nécessaires à la modernisation du secteur. Parallèlement, le ministre veut ouvrir le débat sur les missions de son ministère « qui n'a plus aujourd'hui les mêmes missions essentielles qu'il y a dix ans ».
Plans de développement des filières
Le budget 2011 global en termes de crédits de paiement versés aux différents ministères s'établit à 38 milliards d'euros, dont un peu moins de 25 milliards dévolus à la masse salariale et au fonctionnement, le reste équivalant aux crédits d'intervention. La légère hausse du budget agricole correspond aux plans de développement des filières annoncés cette année au Space de Rennes, pour un montant de 300 millions d'euros sur trois ans, ainsi qu'au dispositif d'exonération totale des cotisations sociales patronales pour l'embauche de salariés saisonniers (travail occasionnel) pour 492 millions, adopté en mars 2010. Des mesures qui visent à « renforcer la compétitivité des filières agricoles », a rappelé Bruno Le Maire, insistant sur le fait que l'exonération pour le travail occasionnel ne se retrouvait « dans aucun autre secteur de l'économie française ».
Les crédits dévolus à la sécurité et à la qualité sanitaires de l'alimentation (510 millions) augmentent de 2 % en raison de la mise en place du programme national de l'alimentation (PNA). Du coup, les crédits baissent sur certains postes, notamment les crédits de fonctionnement (- 5 %).
Renouvellement des crédits PHAE
Une satisfaction réelle pour la profession agricole réside dans le renouvellement en 2011 des crédits PHAE (prime herbagère agro-environnementale), pour un montant de 66 millions d'euros. La question suscitait de très fortes inquiétudes chez les agriculteurs. Autres motifs de satisfaction par rapport à 2010 : le maintien intégral de l'enveloppe de la Prime nationale supplémentaire à la vache allaitante (PNSVA) pour 165 millions, et de l'enveloppe ICHN (indemnités compensatoires de handicap naturel) pour 248 millions.
En outre, comme cela avait été annoncé début septembre, les crédits dévolus à l'installation des jeunes sont maintenus, pour 350 millions d'euros. Les forêts bénéficient de leur côté d'une hausse de 10 % des crédits de paiement en 2011, l'objectif de développement des activités forestières mobilisant 371 millions. Par ailleurs, le ministre souhaite que « l'enseignement technique agricole soit maintenu dans le cadre de l'enseignement scolaire ». L'enseignement agricole hérite dans ce budget 2011 de 1,6 milliard d'euros, dont 1,3 milliard à l'enseignement technique et 300 millions à l'enseignement supérieur et à la recherche.
La mission enseignement agricole participe aussi à l'effort de réduction des dépenses publiques et à l'objectif du non-remplacement d'un départ sur deux à la retraite dans la fonction publique (lire la réaction des syndicats de salariés dans le zoom ci-dessus), avec 120 départs à la retraite non renouvelés en 2011. Ce nombre est jugé « raisonnable » par Bruno Le Maire comparé à d'autres services de son ministère, qui affichera toutes missions confondues un taux de non-renouvellement de 50 % en 2011 (70 à 75 % en 2010), soit 650 emplois non remplacés (dont 450 de titulaires).
Les salariés déçus Chez les syndicats de salariés, on chante une tout autre chanson que le ministre de l'agriculture. La CFDT, la CGT, FO, la FSU, SUD-Rural-Equipement et l'UNSA dénoncent, dans un communiqué commun daté du 29 septembre, un budget 2011 « en contradiction avec les ambitions politiques affichées par le ministre » sur les plans de développement de filières, l'installation des jeunes ou la politique publique de l'alimentation. Leur principale dénonciation : la poursuite de « la réduction drastique des moyens des services » du ministère en 2011, préférant qualifier les non renouvellements de départs à la retraite de « suppressions d'emplois ». Ces suppressions touchent le programme « agriculture, pêche, affaires rurales » mais aussi FranceAgriMer, l'Agence de service de paiement (ASP), l'ONF ou encore l'enseignement agricole.