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X. Beulin : «Ne laissons rien ni personne de côté»

Le président de la FNSEA fait le point sur le plan de soutien du Gouvernement et, plus largement, sur l’avenir de l’agriculture, tout en s’exprimant également sur les critiques dont il a pu faire l’objet.

file-Xavier Beulin, président de la FNSEA.
Xavier Beulin, président de la FNSEA.

Le 3 septembre dernier, un nouveau plan était annoncé par le Gouvernement. Après coup, vous en pensez quoi?
Xavier Beulin -
Ce plan est certes imparfait mais il a le mérite d’exister. Après des mois d’alertes, de crises et d’interpellations, le Gouvernement a pris conscience de la situation. Il va permettre de passer un cap difficile et pose quelques jalons pour l’avenir. Et c’est bien cela l’enjeu majeur que nous souhaitons voir traiter par nos responsables politiques. Nous nous sommes battus, les paysans se sont mobilisés, pendant de longues semaines, pour obtenir rapidement des solutions.

Les soutiens annoncés doivent trouver écho rapidement et les cellules d’urgence doivent tourner à plein pour ne laisser personne sur le bord du chemin. C’est notre volonté. La FNSEA s’est battue pour obtenir de nouveaux moyens, pas par plaisir mais parce que la situation l’exige.

Concrètement, ça donne quoi?
X. B. - Nous entrons dans le vif du sujet. Il faut se battre pour que toutes ces décisions entrent en application rapidement. Les situations compliquées et difficiles des agriculteurs l’exigent. Des mesures d’urgence d’abord avec une année blanche permettant un report total des annuités 2015 aux éleveurs qui le demanderont, ainsi qu’une baisse des cotisations sociales à hauteur de 50 millions d’euros.

Nous nous étions engagés à obtenir l’arrêt des surtranspositions de normes européennes asphyxiant nos exploitations. Nous avons obtenu une pause sur les normes, ainsi qu’un changement des méthodes de travail. Il est essentiel que les professionnels agricoles soient associés à la définition de ces règles. Un premier bilan interviendra en février 2016.

En termes de fiscalité également, nous attendons beaucoup des parlementaires que nous n’avons pas manqué de solliciter durant tout l’été. Nous mettons sous surveillance l’état et ses services pour que la décision politique devienne une réalité de terrain. Nous ne laisserons rien ni personne de côté!

«Les décisions doivent entrer en application»

Le gouvernement fait donc le job?
X. B. - Manuels Valls a conscience des enjeux mais nous payons tant de renoncements que la situation est critique. Ce qui compte maintenant, c’est de mettre en œuvre: Stéphane Le Foll doit s’y consacrer à 100%. Oublions les postures et avançons. Manuel Valls nous a promis de nouvelles méthodes de travail, nous sommes en train de les mettre en place et continuerons d’être très vigilants. Il en va de la survie de l’agriculture française.

Vous êtes régulièrement chahuté par les paysans et brocardé dans les médias, ça vous touche?
X. B. - Je suis chahuté parfois parce que je vais sur le terrain, parce que j’ose proposer des solutions concrètes. Et face à la dureté de certaines situations, face au désespoir, il est normal que certains expriment leur détresse, y compris fortement. Tout l’été, 500 mobilisations ont eu lieu dans tous les départements de France, je suis allé sur le terrain autant que possible. Il est arrivé que je me fasse engueuler, mais ça fait partie de mon job surtout quand on refuse la démagogie. Je suis paysan, nous sommes paysans et une chose est sûre, c’est ensemble que nous construirons l’agriculture de demain.

Quant aux médias, aux personnalités autoproclamées maîtres ès agriculture, ils «aiment» avoir des cibles régulièrement. Ce n’est pas agréable, loin de là, mais je trace mon chemin car face à l’écume des choses, je ne connais que trop les enjeux, les obstacles mais aussi les espoirs des paysans français. Mon rôle, mon devoir, c’est de continuer à défendre l’agriculture, sa compétitivité et sa place dans l’économie de notre pays. 

Votre double casquette Avril/FNSEA pose quand même problème, non?
X. B. - Chacun connaît mon parcours à la tête de la filière oléoprotéagineuse. Je n’ai pas à m’en cacher. Avril est un groupe qui réussit, tout le monde devrait être fier. Qui sait qu’il a investi dans la filière volailles, pour la conforter? Qui sait que la fabrication de tourteaux de colza nous rend moins dépendants des importations? Cette double casquette, je l’assume. Elle est là pour montrer que nous devons nous battre pour une agriculture qui gagne. Le groupe appartient aux agriculteurs. Ce modèle fonctionne! Suivons cette voie pour récupérer de la valeur ajoutée sur l’ensemble des filières! AVRIL est le résultat d’agriculteurs bâtisseurs ayant la volonté de construire un modèle qui profite à tous.

«Je suis un faiseux, pas un diseux»

On sait peu de choses sur vous. Il y a un parcours et un style Beulin?
X. B. - Je suis un faiseux, pas un diseux. Et je crois profondément en la France. Ce pays que l’on aime, nous lui devons beaucoup, alors chaque jour j’essaie de lui rendre un peu. Alors lorsque l’on parle de mon look ou de mes hobbies, en les inventant de toutes pièces, je trouverai cela drôle si la situation n’était pas aussi grave. Tous ceux qui bossent avec moi vous le diront. Je bosse beaucoup et à part cela, je m’occupe de ma ferme avec mes associés. Comme beaucoup de paysans, j’aime être sur mon tracteur. C’est souvent le week-end, et c’est là que je suis le plus heureux, que j’oublie tout, n’en déplaise à mes détracteurs. Démarrer à 17 ans dans des conditions difficiles sa vie de paysan, ça, je ne l’oublie jamais.

On vous dit «libéral»?
X. B. - Le mot n’a pas de sens. À la FNSEA, nous ne souhaitons en aucun cas un marché aveugle et destructeur. Nous n’arrêtons pas de demander des solutions pour faire «édredon» à la mondialisation. Filets de sécurité, régulation, équilibre sont les maîtres mots de notre engagement. Pour autant, le marché existe et, intellectuellement, il ne faut pas faire comme s’il n’existait pas! Sinon on ment sur le cadre des possibilités et des solutions. 

« Je regarde le spectacle politique avec étonnement »

Et la politique dans tout cela?
X. B. - Comme nombre de mes concitoyens, je regarde parfois le spectacle politique avec étonnement pour ne pas dire autre chose. Cependant, je salue celles et ceux qui s’engagent avec souvent un dévouement total. Alors je veux leur dire au lieu de vous combattre, battez-vous pour la France, relevez-la! Beaucoup d’entrepreneurs comme nous sont là pour relever le défi et accompagner le mouvement. Si les décisions sont bonnes, nous le disons et nous les encourageons. 

D’ailleurs, aux régionales, comme précédemment aux européennes et aux municipales, je demande aux paysans de s’engager, pas forcément dans un camp même s’il faut bien choisir, mais pour porter la parole agricole. Je vois arriver avec regret, dans la campagne des élections régionales, cette opposition simpliste et destructrice entre ville et campagne, citadins et ruraux, cela n’est pas de nature à réconcilier les Français entre eux. Nous ne devons pas être une variable électorale mais une ruralité politique efficiente.

Bio, conventionnel, quels modèles?
X. B. - Arrêtons d’opposer des modes de production, donc des paysans entre eux. À la FNSEA, nous soutenons le conventionnel, le bio, les labels, les AOC, l’agriculture raisonnée… Toutes les régions et les modes de productions se retrouvent au sein de notre organisation.

Les consom’acteurs ne sont pas uniformisés, l’agriculture est à leur image. Nous devons répondre à tous les besoins. Et puis, je le rappelle, nos productions obéissent à des normes sanitaires strictes, ce qui fait de notre agriculture l’une des plus sûres au monde. Cessons de nous dénigrer en permanence, en particulier lorsque nous sommes excellents…

Grande distribution, transformation, restauration hors domicile, voyez-vous une évolution dans leur comportement?
X. B. - Depuis trop longtemps, les acteurs de la chaîne alimentaire ne jouent pas le jeu et pourtant ce n’en est pas un! Les actions engagées depuis quelques mois ont sensibilisé mais ce n’est pas suffisant. Il nous faut des prix, des prix justes et équitables. Il est également impératif que le «produire Français» soit favorisé par les décideurs politiques dans la restauration hors domicile: c’est du patriotisme utile, rien de plus. L’information par un étiquetage efficace est pour nous une priorité.

La grande distribution cherche en permanence à se dédouaner de ses responsabilités dans la crise que nous traversons, mais au jeu de qui est le moins cher, la nourriture est devenue la variable d’ajustement des budgets des ménages, et cela n’est plus possible! Les Français l’ont d’ailleurs compris, en témoigne le soutien qu’ils nous ont apporté tout l’été et le 3 septembre à Paris. Pour eux, pour nous, pour l’agriculture, nous ne lâcherons rien, il en va de notre avenir. Mettons notre énergie pour cultiver l’excellence française, pour créer ensemble de la valeur au bénéfice de tous.

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