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La succes story de l’agriculture bio française

En 20 ans, la France est passée de la quatorzième place au premier rang des nations bio en Europe. Une lente construction de marché, qui a bénéficié d’aides revalorisées suite à la réforme de la PAC de 2013, de l’intérêt croissant de l’agroalimentaire et de la distribution.

file-La France est sur le podium européen de la consommation bio, avec un chiffre d’affaires passé de 7 milliards à 12,7 milliards d’euros entre 2015 et 2020, ce qui en fait le deuxième marché européen.
La France est sur le podium européen de la consommation bio, avec un chiffre d’affaires passé de 7 milliards à 12,7 milliards d’euros entre 2015 et 2020, ce qui en fait le deuxième marché européen.

«Nous sommes désormais dans la cour des grands», se réjouit Laure Verdeau, directrice de l’Agence bio. En deux décennies, la SAU bio française est passée de 300.000 hectares à plus de 2,5 millions d’hectares, soit 9,5% de la SAU nationale. Faisant de la France, depuis juillet, le premier pays bio de l’Union européenne en termes de surface. Mais l’Hexagone s’illustre aussi depuis quelques années sur le podium européen de la consommation bio, avec un chiffre d’affaires français passé de 7 milliards à 12,7 milliards d’euros entre 2015 et 2020, ce qui en fait le deuxième marché européen. En 20 ans, le bio peut revendiquer un succès à la fois économique, technique, et culturel. Retour sur l’histoire d’un succès.

Le tournant de 2013

L’État a un rôle majeur dans l’essor de la bio. Avec la création du label officiel AB en 1985, la France a été un pays précurseur en Europe. Mais c’est le règlement européen de 1991 qui, en uniformisant la bio en Europe, «a facilité en France le passage d’un marché d’export vers le marché intérieur», retrace Michel Reynaud, président d’Ecocert et de l’Ifoam. Pourtant, à la fin des années 1990, avec moins de 0,5% de ses terres en agriculture biologique, la France est encore le quatorzième pays en termes de bio sur les quinze membres que compte l’UE à cette époque.

Comme le montre l’évolution des surfaces, un premier effort budgétaire portant les aides à la conversion de 15 à 60 millions de francs en 1997 propulse rapidement les surfaces bio à 580.000 ha environ vers 2003. La croissance ne reprend ensuite qu’en 2009, avec le bilan de santé de la PAC, qui fera passer la SAU bio à 1,1 million d’hectares. Une dynamique accélérée pour de bon à partir de 2013 par la réforme de la politique européenne. «C’est cette programmation qui a modifié les règles du jeu», appuie Étienne Gangneron.

Le ralliement des grandes cultures

Tout au long des 20 dernières années, les gouvernements ont tenté d’encadrer le développement de la bio par des plans successifs. D’abord en 1998, avec le plan pluriannuel de développement de l’AB (PPDAB) de Louis Le Pensec (PS). Un premier essai suivi en 2008 du programme “Agriculture biologique : Horizon 2012” de Michel Barnier (RPR), puis en 2013 du plan Ambition bio 2017 de Stéphane Le Foll (PS), et récemment prolongé en 2018 par le plan Ambition bio 2022 de Stéphane Travert (LREM). «Ces plans n’ont connu que des succès très relatifs ou, si l’on préfère, ont essuyé des échecs répétés», tranchait le Sénat dans un rapport d’information publié en janvier 2020. Principal reproche de la chambre haute : des cibles de surface toutes aussi «irréalistes» et qui n’ont jamais été atteintes.

Alors que les fourrages bio progressaient rapidement, atteignant déjà 300.000 ha en 2005, les objectifs nationaux de surface ont longtemps buté sur les grandes cultures. Et pour Étienne Gangneron, la hausse significative en grandes cultures ne serait observée que «depuis 3 ou 4 ans.» Une accélération directement facilitée par la revalorisation des aides, mais aussi de manière plus détournée par d’autres évolutions de la PAC. «La réglementation sur l’implantation des couverts a fait revenir beaucoup d’espèces dans le paysage, et les gens se sont par exemple mis à semer du lin, des lentilles», observe Philippe Camburet, président de la FNAB.

Le récent intérêt des grandes cultures s’expliquerait également par la diffusion des techniques en matière de désherbage, ou de gestion des couverts, qui ont elles aussi facilité les conversions. «Avec le premier salon Tech & bio organisé par les chambres en 2007, on a senti un vrai changement, avec une réponse de terrain aux attentes des producteurs», se souvient Michel Reynaud, chez Ecocert. Autre facteur de taille, selon Christine Valentin, première vice-présidente de l’APCA : la «grosse demande de la part des filières animales, qui ont ouvert de nouveaux marchés.»

Une industrie au rendez-vous

Des crises d’origines diverses auraient également joué un rôle central dans le développement de la production et de la consommation. Comme la chute des cours de certains produits agricoles à la fin des années 2000, qui aurait poussé de nombreux producteurs à la conversion. Parallèlement, après des scandales comme la vache folle ou les dioxines, «le consommateur avait besoin d’être rassuré», rappelle Laure Verdeau à l’Agence bio.

«Il ne faut pas oublier que les conversions chez les PME font aussi partie de cette évolution», souligne Didier Perreol, président du Synabio et fondateur d’Ekibio. Selon les chiffres de l’Agence bio, le nombre d’entreprises dans la transformation, la distribution ou encore l’import-export serait ainsi passé de moins de 5.000 en 2005, à près de 26.000 en 2020. «Dans tous les pays les plus avancés sur le bio, comme l’Allemagne, l’Italie ou l’Espagne, on retrouve cette dynamique de l’aval qui participe de manière très forte au développement», appuie Michel Reynaud.

L’engouement des transformateurs serait dû lui aussi aux aides à la conversion chez les agriculteurs, qui ont apporté un flux de matière première, mais également aux garanties apportées par le fonds Avenir bio. Dédié aux projets de filière, ce fonds aurait accordé près de 50 millions d’euros à des projets de filières depuis sa création en 2008. Une somme qui paraît faible sur un marché à 13 milliards d’euros, mais qui a permis «de fédérer des euros publics», insiste Laure Verdeau, à l’Agence bio, évoquant les cofinancements des régions ou des collectivités.

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